Dédicace de l’Archibasilique du Très Saint Sauveur – textes et commentaire

Nous vous proposons une présentation des textes liturgiques propres à ce dimanche (rite catholique traditionnel, tel que le suivaient nos aïeux), avec des commentaires préalables.

« La constitution divine de l’Église est hiérarchique, hiérarchie des ministères du Pape aux évêques par la succession apostolique, de l’évêque au curé par la mission donnée par le Pasteur du Diocèse, du curé aux fidèles par l’éminente responsabilité du curé sur chacune des âmes du peuple de Dieu qui lui sont ainsi confiées par l’Église.

Cette hiérarchie se retrouve exprimée de manière liturgique par la hiérarchie des Autels. Les cérémonies d’installation de chaque nouveau successeur de Pierre se terminent par son installation sur la cathèdre de sa cathédrale et la célébration de sa première messe sur l’autel majeure de cette cathédrale, la basilique du Latran. Chaque année, l’Église convoque les fidèles pour l’anniversaire de la dédicace de cette « cathédrale des cathédrales » le 9 novembre.

Devant son autel cathédral, l’évêque de chaque diocèse paraît dans tout l’éclat de sa plénitude sacerdotale. Sanctificateur premier de son troupeau, il exerce sa primauté par excellence chaque fois qu’il célèbre dans l’Église Mère du diocèse, qu’il y confère les saints ordres ou consacre les saintes huiles qui serviront aux sacrements dispensés dans son diocèse. Comme pour la cathédrale du Pape, l’Église convoque les fidèles à l’anniversaire de la dédicace de l’Église Mère du diocèse.

Pour soumettre à l’action vivifiante de son sacerdoce jusqu’aux extrémités les plus reculées de son diocèse, l’évêque détache des prêtres et les envoie avec mission « d’offrir, de bénir de présider, d’instruire et de baptiser » en dépendance de lui, chacun devant l’autel paroissial que lui ou ses prédécesseurs ont dressé et consacré. Comme les prêtres dépendent de leur évêque, ainsi les églises paroissiales dépendent de l’Église Mère du diocèse.

L’extension du royaume surnaturel du Christ dans les âmes par le rayonnement de sa lumière et la diffusion de sa vie constitue une œuvre de conquête conduite par la hiérarchie sacerdotale de l’Église militante, qui, au fur et à mesure qu’elle enseigne les nations et les baptise au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, les groupe autour de ses autels comme autour d’autant de foyers où elle leur départit sans mesure la vie surnaturelle, la vie divine, la grâce qui émane de la plénitude du Christ. Dans un diocèse, les autels paroissiaux constituent les bornes miliaires de la prise de possession du royaume des âmes par l’Église.

Non seulement les fidèles sont convoqués chaque année pour l’anniversaire de la dédicace de leur église paroissiale, mais la liturgie en fait la solennité le dimanche suivant. »

TEXTES AVEC COMMENTAIRE DE DOM GUÉRANGER (dans l’Année liturgique – disponible ici avec ses autres livres) :

Au quatrième siècle de notre ère, la fin des persécutions sembla au monde un avant-goût de sa future entrée dans la cité de la paix sans fin. « Gloire au Tout-Puissant ! Gloire au Rédempteur de nos âmes ! » s’écrie, en tête du dixième et dernier livre de son Histoire, le contemporain Eusèbe. Et témoin du triomphe, il décrit l’admirable spectacle auquel donna lieu partout la dédicace des sanctuaires nouveaux. De villes en villes, s’assemblaient les évêques et s’empressaient les foules. De peuples à peuples, une telle bienveillance de mutuelle charité, de commune foi, d’allégresse recueillie harmonisait les cœurs, que l’unité du corps du Christ apparaissait aux yeux, dans cette multitude animée d’un même souffle de l’Esprit-Saint ; c’était l’accomplissement des anciennes prophéties : cité vivante du Dieu vivant où tout sexe et tout âge exaltaient l’auteur de tous biens. Combien augustes apparurent alors les rites de notre Église ! la perfection achevée qu’y déployaient les Pontifes, l’élan de la psalmodie, les lectures inspirées, la célébration des ineffables Mystères formaient un ensemble divin.

Constantin avait mis les trésors du fisc à la disposition des évêques, et lui-même stimulait leur zèle pour ce qu’il appelait dans ses édits impériaux l’œuvre des églises. Rome surtout, lieu de sa victoire par la Croix et capitale du monde devenu chrétien, bénéficia de la munificence du prince. Dans une série de dédicaces à la gloire des Apôtres et des saints Martyrs, Silvestre, Pontife de la paix, prit possession de la Ville éternelle pour le vrai Dieu.

Aujourd’hui fut le jour natal de l’Église Maîtresse et Mère, dite du Sauveur, Aula Dei [Palais de Dieu], Basilique d’or ; nouveau Sinaï, d’où les oracles apostoliques et tant de conciles notifièrent au monde la loi du salut. Qu’on ne s’étonne pas d’en voir célébrer la fête en tous lieux.

Si depuis des siècles les Papes n’habitent plus le palais du Latran, la primauté de sa Basilique survit dans la solitude à tout abandon. Comme au temps de saint Pierre Damien, il est toujours vrai de dire qu’ « en la manière où le Sauveur est le chef des élus, l’Église qui porte son nom est la tête des églises ; que celles de Pierre et de Paul sont, à sa droite et à sa gauche, les deux bras par lesquels cette souveraine et universelle Église embrasse toute la terre, sauvant tous ceux qui désirent le salut, les réchauffant, les protégeant dans son sein maternel. » Et Pierre Damien appliquait conjointement au Sauveur et à la Basilique, sacrement de l’unité, les paroles du prophète Zacharie : Voici l’homme dont le nom est Orient ; il germera de lui-même, et il bâtira un temple au Seigneur ; il bâtira, dis-je, un temple au Seigneur, et il aura la gloire, et il s’assiéra : et sur son trône il sera Roi, et sur son trône il sera Pontife.

C’est au Latran que, de nos jours encore, a lieu la prise de possession officielle des Pontifes romains. Là s’accomplissent chaque année en leur nom, comme Évêques de Rome, les fonctions cathédrales delà bénédiction des saintes Huiles au Jeudi saint et, le surlendemain, de la bénédiction des fonts, du baptême solennel, de la confirmation, de l’ordination générale. Prudence, le grand poète de l’âge du triomphe, reviendrait en nos temps qu’il dirait toujours : « A flots pressés le peuple romain court à la demeure de Latran, d’où l’on revient marqué du signe sacré, du chrême royal ; et il faudrait douter encore, ô Christ, que Rome te fût consacrée ! »

Tant de détails donnés dans les lectures de l’office de ce jour [10]courent le risque de sembler superflus aux profanes. En la manière cependant que le Pape est notre premier et propre pasteur à tous, son Église de Latran est aussi notre Église ; rien de ce qui la concerne ne saurait, ne devrait du moins, laisser le fidèle indifférent. Inspirons-nous à son endroit des belles formules qui suivent, et que nous donne le Pontifical romain au jour de la consécration des Églises ; elles ne sauraient s’appliquer mieux qu’à l’Église Mère.

Introït :
(Gen. 28, 17.) Ce lieu est terrible : c’est la maison de Dieu et la porte du ciel, et on l’appellera le palais de Dieu.
(Ps. 83, 2-3). Que vos tabernacles sont aimables, ô Dieu des armées ! Mon âme soupire et languit après les parvis du Seigneur.
V/. Glória Patri.

Collecte :
O Dieu, qui renouvelez chaque année en notre faveur le jour où ce saint temple vous a été consacré, et qui nous conservez en état d’assister à vos saints mystères, exaucez les prières de votre peuple et accordez à quiconque entrera dans ce temple pour demander vos grâces, la joie de les avoir obtenues.

Lecture de l’Apocalypse de saint Jean Apôtre (Apoc. 21, 2-5.) :
« En ces jours-là, je vis la cité sainte, la Jérusalem nouvelle, qui descendait du ciel, d’auprès de Dieu, prête comme une épouse qui s’est parée pour son époux. Et j’entendis une voix forte venant du trône, qui disait : Voici le tabernacle de Dieu avec les hommes, et il habitera avec eux ; et ils seront son peuple, et Dieu lui-même sera avec eux, comme leur Dieu ; et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort n’existera plus, et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car ce qui était autrefois a disparu. Alors celui qui était assis sur le trône dit : Voici, je vais faire toutes choses nouvelles. »

Graduel :
 Ce lieu a été fait par Dieu même : c’est un mystère inappréciable, il est exempt de toute souillure.
V/. O Dieu devant qui se tient le chœur des Anges, exaucez la prière de vos serviteurs.
Allelúia, allelúia.
V/. (Ps. 137, 2.) J’adorerai dans votre saint temple, et je célébrerai votre nom. Alléluia.

Lecture du Saint Evangile selon saint Luc (Luc. 19, 1-10.) :
« En ce temps-là, Jésus étant entré dans Jéricho, traversait la ville. Et voici qu’un homme, nommé Zachée, chef des publicains, et fort riche, cherchait à voir qui était Jésus ; et il ne le pouvait à cause de la foule, parce qu’il était petit de taille. Courant donc en avant, il monta sur un sycomore pour le voir, parce qu’il devait passer par là. Arrivé en cet endroit, Jésus leva les yeux ; et l’ayant vu, il lui dit : Zachée, hâte-toi de descendre ; car, aujourd’hui, il faut que je demeure dans ta maison. Zachée se hâta de descendre, et le reçut avec joie. Voyant cela, tous murmuraient, disant qu’il était allé loger chez un homme pécheur. Cependant Zachée, se tenant devant le Seigneur, lui dit : Seigneur, voici que je donne la moitié de mes biens aux pauvres ; et si j’ai fait tort de quelque chose à quelqu’un, je lui rends le quadruple. Jésus lui dit : Aujourd’hui le salut a été accordé à cette maison, parce que celui-ci est aussi un fils d’Abraham. Car le Fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu. »

Offertoire (1. Paral. 29, 17 et 18.) :
Seigneur, mon Dieu, je vous ai offert toutes ces choses dans la simplicité de mon coeur et avec joie ; et j’ai été ravi de voir aussi tout ce peuple assemblé, ô Dieu d’Israël, conservez cette volonté, alléluia.

Secrète :
Nous vous en supplions, Seigneur, accueillez favorablement nos prières et qu’en nous acquittant de nos vœux dans la vie présente, nous méritions de parvenir, grâce à votre secours, aux récompenses éternelles.

Communion (Matth. 21, 13.) :
Ma maison sera appelée une maison de prière, dit le Seigneur. Quiconque y demande reçoit ; et celui qui cherche trouve ; et on ouvrira à celui qui frappe.

Postcommunion :
O Dieu qui préparez un temple éternel à votre majesté au moyen de pierres vivantes et choisies, venez en aide à votre peuple suppliant, afin que ce qui est utile à votre Église en fait d’espaces matériels soit l’occasion d’accroissements spirituels.

 

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