Louis Veuillot sur l’homme moderne, la médecine et la peur. « Le culte de la médecine ne connaît point d’athée parmi ceux qui nient tout le reste »

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Le journaliste et écrivain catholique Louis Veuillot (1813-1883 – livres de lui ou sur lui ici) produisit des lignes qui sont d’une remarquable actualité, alors que l’homme moderne, sans (vraie) religion et par goût faussé de la liberté, se soumet à la superstition et à la tyrannie, y compris au risque de sa santé (avec de la thérapie génique controversée).

« La médecine tient une grande place chez les nations incrédules. Plus l’homme s’éloigne des vérités chrétiennes, plus il s’attache à la vie. Qu’il se croie réservé au néant, que la pensée d’une autre vie vienne quelquefois le tourmenter, vivre longtemps est son affaire principale; car sa nature a horreur du néant, et sa conscience a peur de l’éternité.
Il craint la maladie, non-seulement parce qu’elle est la privation des jouissances, seul bonheur auquel il sache aspirer ;
non seulement parce qu’elle est la douleur, dont il ignore le prix et contre laquelle son âme est sans force; mais parce qu’elle est l’annonce ou la menace de cette mort qui va, ou le détruire tout entier comme un vil animal, ou peut-être le livrer impérissable et souillé aux arrêts de la suprême justice. Tant qu’il se porte bien , volontiers sceptique et irrévérencieux envers l’art de guérir, au premier frisson la médecine devient son unique espérance. Il se remet entre ses mains, docile jusqu’à la lâcheté, crédule jusqu’à la stupidité.

Le culte de la médecine ne connaît point d’athée parmi ceux qui nient tout le reste. Combien n’en voit-on pas de ces forts esprits, moqueurs superbes des pratiques et des abstinences religieuses, qui, une fois atteints d’un mal réel ou imaginaire, deviennent sobres, continents, fuient le monde et les affaires, font des retraites à la campagne et des pèlerinages aux bains, vont au loin consulter les empiriques et les somnambules, portent sur eux , en guise de scapulaire , quelque morceau de camphre ou quelque flacon d’odeur! Il n’y a rien que le médecin ne puisse obtenir d’eux. Ce corps qui leur inspire tant de soucis, ils le soumettent à des pénitences de fakir. Ils paient et ils avalent sans murmurer les drogues les plus infâmes , ils gardent la prison, ils battent la campagne à marches forcées, ils se flagellent, ils s’exilent, ils vont se plonger dans des eaux glacées ou putrides. Que ne feraient-ils pas ? 
Si le médecin leur disait de passer tous les jours deux heures à genoux sur les dalles, devant un cierge allumé, certes, ils encombreraient nos églises et contraindraient l’État d’en bâtir de nouvelles !  »