Les émeutes de ce week-end lus dans les comptes-rendus de la police

Le site Atlantico a pu se procurer les comptes-rendus des manifestations qui ont eu le week-end dernier à Barbès et Sarcelles. Nous retranscrivons les passages les plus intéressants. (Le document original est donc tronqué). Il y a eu 21 gardes à vue à Paris le samedi et 11 à Sarcelles le dimanche. Pour mémoire, nous rappelons qu’il y en a eu 231 (non, il n’y a pas d’erreur, deux cent trente-et-une) gardes à vue le 26 mai 2013 lors de la manif pour tous. Et ce n’est que pour un soir. Ainsi, la veille, le 25 mai donc, il y en avait eu 56 pour une manifestation qui avait rassemblé seulement quelques centaines de personnes. Le tout, faut-il le préciser, sans qu’aucun policier ne fût blessé, ni aucune dégradation commise, sauf, il est vrai, la pelouse des invalides qui avait été piétinée par plus de un million de manifestants…

Le 19 juillet les CRS feront état de heurts d’une rare violence avec les émeutiers. Une dépêche note qu’un policier a été mordu à l’oreille. Une autre qu’un fonctionnaire s’est fait voler son portable par un émeutier. Du jamais vu lors d’une manifestation. Enfin, les comptes-rendus font état de dégâts physiques dont ont été victimes de nombreux policiers. On ne compte plus les sifflements d’oreilles, les coups aux tibias ou les épaules couvertes d’ecchymoses…

En tout, 14 compagnies de CRS venant de toute la France ont été mobilisées et ont stationné dans les endroits stratégiques. Les manifestants structurés « comme des maquisards » selon un CRS sur le terrain à Barbès, venus de banlieue, ne se sont pas privés de desceller le mobilier urbain ou d’aller menacer une pharmacienne qui critiquait un peu vivement un casseur. « Ferme ta gueule ou on fout le feu à ta pharmacie » s’est-elle vu répondre.

Les membres de la CRS n° 31, celle de Darnetal (Seine-Maritime) a connu de durs moments. Alors qu’elle se trouvait en mouvement à 15 heures 30, sur le boulevard Barbès, littéralement assommée de jets de bouteilles de verre, elle a dû répliquer et lancer des grenades. C’est ainsi qu’en 3 heures de temps, les hommes de la CRS n°31 ont lancé 380 MP7 – des grenades qui comportent 7 petits pots prêts à exploser – et utiliser un dispositif qui permet d’envoyer une grenade à 100 mètres. Preuve que les 68 policiers de cette CRS ont fait face à des individus particulièrement tenaces, n’ayant peur de rien. Du côté des policiers, les dégâts physiques sont considérables. 34 d’entre eux – soit la moitié de l’effectif – ont été sérieusement contusionnés. Cela va d’une douleur aux oreilles à un avant-bras esquinté en passant par une jambe ou une épaule couverte de bleus. Quant aux dégâts matériels, ils se passent de commentaires : boucliers fendus, jambières détruites, visières cassées ou fendues, casques perdus etc…

La CRS n°21 en provenance de Limoges en poste du côté du boulevard Magenta a même eu un de ses policiers mordus à l’oreille. Côté du boulevard de La Chapelle, la CRS n°10 du Mans a connu des moments délicats. Vers 16 heures, ses fonctionnaires reçoivent des tas de projectiles parmi lesquels des barres de fer. « L’agression est violente » note le commandant dans son compte-rendu. Des conteneurs lacrymogènes sont utilisés. Les manifestants sont repoussés. Moments tout aussi délicats pour la CRS n°9 de Rennes, qui, stationnée boulevard Rochechouart tente de contenir dès 14 heures 50 une cinquantaine de militants du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA). Les choses ne se passent pas trop mal.

Les policiers de la CRS 9 ont trinqué. Douze d’entre eux sont en mauvais état. Une cervicale douloureuse pour l’un, une coupure sur le crâne pour l’autre. Certains souffrent de l’épaule, des genoux ou du tibia. Les esquintés sont du côté des CRS. Quatre individus ont été interpellés, deux pour rébellion, deux pour jet de projectiles sur les forces de l’ordre. L’un d’entre eux, qui ne doute de rien, semble avoir volé le portable d’un policier. Lequel va porter plainte.

Le lendemain à Sarcelles, le 20 juillet 2014, au départ, 500 manifestants laissent s’exprimer quelques orateurs. Puis au moment de la dislocation, suivie de près par compagnie de CRS n°10 du Mans, une cinquantaine de personnes cagoulées cherchant le contact avec les forces de l’ordre se met à lancer des projectiles. Quelques minutes plus tard, un groupe de 200 jeunes cagoulés, armés de bâtons, souhaitent se rendre à la synagogue. On est bord de l’insurrection. Le commandant de CRS, dans son rapport, note qu’il s’agit de « 200 personnes hostiles en agression violente. » Des grenades sont lancées. Les jeunes sont tenus à distance. Des feux de poubelle commencent à prendre. Les manifestants se replient du côté de la gare du RER D de Garges-les-Gonesse-Sarcelles. Au nombre de 300, ils veulent incendier la gare. Un feu a pris sur la rame de tramway T5 qui relie Garges-les-Gonesse-Sarcelles.

Le harcèlement contre les forces de l’ordre, visées par des engins incendiaires, s’intensifie. On voit des scènes ahurissantes. Quasi apocalyptiques comme il en existe au cinéma. Des voitures de police sont saccagées. Une partie de la ville de Sarcelles semble dévastée. De nombreux policiers sont sonnés. Ainsi, à la CRS n°55, on recense un fonctionnaire touché à la cuisse droite à la suite du lancement d’un projectile, un autre est atteint de sifflements d’oreilles, un troisième se plaint d’une forte douleur à la main droite… Dix-huit personnes ont été interpellées. Parmi elles, phénomène nouveau, deux femmes âgées de 58 et 60 ans.. Deux garçons d’une vingtaine d’années ont été arrêtés pour incitation à la haine raciale : ils avaient « fait » une quenelle devant un policier…

Voilà donc comment les CRS ont été malmenés. On apprend donc aussi, qu’au milieu de l’apocalypse, il faut éviter de faire une quenelle car, dans ce cas, on est interpellés pour incitation à la haine raciale. La police n’a vraiment pas changé entre l’année dernière et cette année…