Acca Larentia

A quelques heures de m’envoler pour Rome à l’occasion de la commémoration de la tragédie de 1978, je ne peux m’empêcher de mettre en parallèle le martyr de ces jeunes militants et la petitesse, la médiocrité, la bassesse et la mesquinerie des débats et des « affaires » qui agitent un « milieu » qui se gargarise de grands mots à défaut de réaliser de petites choses.

On peine à trouver le lien, la continuité entre ce sacrifice ultime et les escarmouches picrocholines et autres attaques ad hominem qui sont devenues l’essentiel de l’activité de gens se réclamant pourtant de ces figures du passé.

Comment en est-on arrivé là ? Oh, bien évidemment, il y a de rares et précieuses exceptions, dont on est toujours persuadé faire partie alors qu’à des degrés divers, par son orgueil, son cynisme, sa prétention ou sa bêtise, on nourrit l’ambiance délétère et l’impuissance groupusculaire dans laquelle se morfond désormais une mouvance qui n’a plus de prise sur le réel de son temps ni sur l’existence de son peuple.

Plus de hiérarchie, plus de respect, plus de règles, plus d’ordre, plus de travail…

On se permet de tout jauger, de tout juger, du haut de sa suffisance construite sur l’hypertrophie d’un ego de petit moderne nourri aux citations grandioses et mal comprises. On a rien fait, mais on sait tout.

On est un « ancien » avant même d’avoir été quoi que ce soit. Blasé de naissance, péremptoire de caractère, inutile par destinée.
On s’envie, on se déteste, on se jalouse, on se méprise, parce qu’on a le temps pour ça vu qu’on ne réalise plus rien.

Les initiatives se comptent sur les doigts d’une main et on y croise toujours les mêmes visages. On se plaint, on se lamente, on glaviote, on beugle mais on ne « produit » pas…

Il ne reste plus alors qu’à faire défiler, nostalgiques et séniles avant l’heure, les couvertures jaunies des fanzines passés, les programmes des colloques anciens, les souvenirs des camps d’été lointains, les ouvrages des gloires antiques…

Pourtant nous sommes encore là, nos cœurs palpitent toujours malgré la crasse accumulée, nos âmes sont demandeuses, nos mains avides d’ouvrage…
Alors que nous manque-t-il ? Et si nous cherchions la réponse dans le visage des jeunes martyrs du 7 janvier, dans leurs traits à la fois si ordinaires et si pénétrants, dans leur proximité et leur grandeur ?
Qu’ont-ils à nous dire, à nous demander ?

Ils n’exigent certainement pas de nous des sacrifices de la même nature que le leur. Ils nous demandent simplement d’être sérieux. De travailler, de donner, d’oeuvrer. Joyeux, enthousiastes, ambitieux, excessifs, fougueux, mais sérieux. Sérieux. Car tout cela n’est pas un jeu.

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1 commentaire concernant l'article “Acca Larentia”

  1. un petit billet historique comme celui qu’a donné Synthèse Nationale, rappelant ce qui s’est passé en 1978 aurait sans doute été plus utile au jeunes lecteurs français, plus utile que ce énième crachat sur « la mouvance ». Je suggère un peu plus de respect pour ceux qui – au delà toute l’inculture organisée, tous les mensonges, toutes les errances idéologiques, toutes les marques d’immaturité oui c’est vrai– ceux qui ont quand même fait le choix absolu et non-conformiste de l’impossible. Ils sont aussi, ils ont d’abord nos camarades.

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