Dimanche des Rameaux – textes et commentaire

Nous vous proposons une présentation des textes liturgiques propres à ce
dimanche (rite catholique traditionnel), avec commentaire.

La liturgie d’aujourd’hui se compose de deux parties distinctes : l’une empreinte de joie, la procession des rameaux ; l’autre de tristesse, la messe et le chant de la Passion.

INTRODUCTION PUIS COMMENTAIRE DE DOM GUÉRANGER
(dans l’Année liturgiquedisponible ici avec ses autres livres)
(il s’agit des commentaires sur la célébration traditionnelle des Rameaux avant 1955) :

« La Messe de ce Dimanche ne retient plus aucune trace de la joie qui éclatait dans la cérémonie des Palmes. L’Introït est extrait du Psaume XXI, dans lequel David exprime les angoisses du Christ sur la croix.

Introït (Ps. 21, 20 et 22) :
Seigneur, n’éloignez pas de moi votre secours : soyez attentif à me défendre ; délivrez-moi de la gueule du lion et des cornes des buffles, car je suis bien faible et humilié.
(Ps. ibid., 2.) O Dieu, mon Dieu, tournez vers moi votre regard ; pourquoi m’avez-vous abandonné ? La voix de mes péchés éloigne de moi le salut.

 

Dans la Collecte, l’Église demande pour nous la grâce d’imiter la patience et l’humilité du Sauveur. C’est pour l’homme pécheur que Jésus-Christ souffre et qu’il s’abaisse ; il est juste que l’homme profite de l’exemple, et opère son salut par les moyens que lui révèle la conduite de son Rédempteur.

Collecte :
Dieu tout-puissant et éternel, qui avez voulu que notre Sauveur prît la chair humaine et supportât les tourments de la croix, afin de servir de modèle d’humilité au genre humain, accordez-nous, dans votre bonté, d’être, à son exemple, toujours courageux dans les épreuves et de mériter par là d’avoir part à sa résurrection.

ÉPÎTRE.
Lecture de la lettre de l’Apôtre saint Paul aux Philippiens (Philipp. 2, 5-11.)
Mes frères : Ayez en vous les mêmes sentiments dont était animé le Christ Jésus : bien qu’il fût Dieu par nature, il n’a pas retenu avidement son égalité avec Dieu, mais il s’est anéanti lui-même en prenant la condition d’esclave, en devenant semblable aux hommes, à l’extérieur absolument comme un homme. Il s’est abaissé lui-même, se faisant obéissant jusqu’à la mort de la croix. C’est pourquoi Dieu l’a souverainement élevé et lui a donné le nom qui est au-dessus de tout nom
(ici on fléchit le genou), afin qu’au nom de Jésus tout genou fléchisse, au ciel, sur la terre et dans les enfers, et que toute langue proclame, à la gloire de Dieu le Père, que Jésus-Christ est Dieu.

La sainte Église nous prescrit de fléchir le genou à l’endroit de cette Épître où l’Apôtre dit que tout doit s’abaisser quand le nom de Jésus est prononcé. Nous venons d’accomplir ce commandement. Comprenons que, s’il est une époque dans l’année où le Fils de Dieu ait droit à nos plus profondes adorations, c’est surtout en cette Semaine, où sa divine majesté est violée, où nous le voyons foulé sous les pieds des pécheurs. Sans doute nos cœurs doivent être animés de tendresse et de compassion à la vue des douleurs qu’il endure pour nous ; mais nous devons ressentir avec non moins de vivacité les outrages et les indignités dont il est abreuvé, lui qui est l’égal du Père, et Dieu comme lui. Rendons-lui par nos abaissements, autant du moins qu’il est en nous, la gloire dont il se prive pour réparer notre orgueil et nos révoltes, et unissons-nous aux saints Anges qui, témoins de tout ce que lui a fait accepter son amour pour l’homme, s’anéantissent plus profondément encore, en voyant l’ignominie à laquelle il est réduit.

Dans le Graduel, l’Église se sert des paroles du Roi-Prophète qui prédit les grandeurs futures de la victime du Calvaire, mais qui, en même temps, confesse que l’affreuse sécurité avec laquelle les Juifs devaient commettre le déicide avait ébranlé son âme tout entière.

Graduel (Ps. 72, 24 et 1-3.) :
Mon Dieu, vous m’avez pris la main droite ; vous m’avez conduit selon votre volonté et vous m’avez glorifié.
V/. Qu’il est bon, le Dieu d’Israël, pour tous ceux qui ont le cœur droit. J’étais sur le point de fléchir, mon pied a presque glissé, car je portais envie aux impies en voyant le bonheur de ces méchants.

Le Trait est formé d’une partie considérable du Psaume XXI, dont Jésus-Christ répéta les premières paroles sur la Croix, et qui est autant une histoire de la Passion du Sauveur qu’une prophétie : tant les paroles en sont claires et évidentes.

Trait (Ps. 21, 2-9, 18, 19, 22, 24 et 32.) :
Mon Dieu, mon Dieu, tournez vers moi votre regard, pourquoi m’avez-vous abandonné ?
V/. La voix de mes péchés éloigne de moi le salut.
V/. Mon Dieu, je crie pendant le jour et vous ne m’écoutez pas ; la nuit, et je n’obtiens pas de soulagement.
V/. Pourtant vous habitez dans votre sanctuaire et vers vous montent les louanges d’Israël.
V/. Nos pères ont espéré en vous et vous les avez délivrés.
V/. Ils ont mis en vous leur confiance et ils n’ont pas été trompés.
V/. Mais moi, je suis un ver de terre et non un homme, l’opprobre des hommes et le rebut du peuple.
V/. Tous ceux qui me voient me méprisent. Ils ouvrent les lèvres et branlent la tête, en disant
V/. « Il a mis sa confiance dans le Seigneur, qu’il le sauve, puisqu’il l’aime. »
V/. Ils m’observent et me regardent. Ils se partagent mes vêtements, ils tirent au sort ma tunique.
V/.  « Seigneur, délivrez-moi de la gueule du lion et des cornes des buffles. »
V/. Vous qui craignez le Seigneur, louez-le, vous tous, descendants de Jacob, chantez ses louanges.
V/. On parlera du Seigneur à la génération future. Ils viendront et ils annonceront ce qu’il a accompli.
V/. Au peuple qui naîtra, ils diront ce qu’il a fait.

Il est temps d’écouter le récit de la Passion de notre Sauveur ; mais afin de montrer au ciel et à la terre que nous ne sommes pas scandalisés, comme le furent les disciples, par le spectacle de son apparente faiblesse et du triomphe de ses ennemis, tenons en mains [9] les rameaux avec lesquels tout à l’heure nous l’avons proclamé notre Roi.

L’Église lit, à quatre jours différents de cette Semaine, la narration des quatre Évangiles. Elle commence aujourd’hui parcelle de saint Matthieu, qui le premier a écrit son récit sur la vie et la mort du Rédempteur. En signe de tristesse, les Acolytes ne viennent pas à l’ambon avec leurs cierges, et le livre n’est pas encensé. Sans saluer le peuple fidèle par le souhait ordinaire, le Diacre qui remplit le rôle de l’historien commence immédiatement son lamentable récit.

(Après la mort de Notre-Seigneur) l’historien fait une pause dans sa lecture, pour honorer par un acte solennel de deuil la mort du Sauveur des hommes. Toute l’assistance se met à genoux, et demeure quelque temps dans le silence. En beaucoup de lieux, on se prosterne et on baise humblement la terre. Le Diacre reprend ensuite son récit.

Afin que la Messe de ce jour ne soit pas privée d’un rite essentiel, qui consiste dans la lecture solennelle de l’Évangile, le Diacre réserve une dernière partie du récit lugubre qu’il a fait entendre, et s’approchant de l’autel, il vient y faire bénir l’encens par le Prêtre et recevoir la bénédiction. Il se rend ensuite à l’Ambon ; mais les Acolytes ne l’accompagnent pas avec leurs flambeaux. Après avoir encensé le livre, il termine la narration évangélique.

Passion de Notre-Seigneur Jésus-Christ selon saint Mathieu :
En ce temps-là, Jésus alla avec ses disciples dans une propriété appelée Gethsémani, et dit à ses disciples : « Asseyez-vous ici, pendant que j’irai là pour prier. » Et ayant pris avec lui Pierre et les deux fils de Zébédée, il commença à être contristé et rempli d’amertume. Alors il leur dit : « Mon âme est triste jusqu’à la mort : demeurez ici et veillez avec moi. » Et, s’étant éloigné un peu, il se prosterna le visage contre terre, priant et disant : « Mon Père, s’il est possible, que ce calice s’éloigne de moi ; néanmoins, non pas comme je veux, mais comme vous voulez. » Il vint ensuite à ses disciples et, les trouvant endormis, il dit à Pierre ; « Ainsi, vous n’avez pu veiller une heure avec moi ! Veillez et priez, pour ne point tomber dans la tentation ; l’esprit est prompt, mais la chair est faible. » Il s’en alla une seconde fois et pria, disant : « Mon Père, si ce calice ne peut passer sans que je le boive, que votre volonté soit faite. » Et il vint de nouveau et les trouva endormis, car leurs yeux étaient appesantis. Et, les laissant, il s’en alla encore et pria une troisième fois, répétant les mêmes paroles. Après, il revint à ses disciples et leur dit : « Dormez maintenant et reposez-vous. Voici que l’heure approche où le Fils de l’homme va être livré entre les mains des pécheurs. Levez-vous et allons : celui qui doit me trahir est près d’ici. » Il parlait encore lorsque Judas, l’un des douze, arriva, et avec lui une troupe nombreuse de gens armés d’épées et de bâtons, envoyés par les princes des prêtres et les anciens du peuple. Or, le traître leur avait donné un signe, disant : « Celui que je baiserai, c’est lui, arrêtez-le. » Et aussitôt, s’approchant de Jésus, il lui dit : « Salut, Maître », et il lui donna un baiser. Jésus lui dit : « Mon ami, pourquoi êtes-vous venu ? » Alors les autres s’avancèrent, mirent la main sur Jésus et se saisirent de lui. Et voilà qu’un de ceux qui étaient avec Jésus, étendant la main, tira son épée et, frappant un des gens du grand-prêtre, lui coupa l’oreille. Alors Jésus lui dit : « Remettez votre épée en place, car tous ceux qui prendront l’épée périront par l’épée. Croyez-vous que je ne puisse pas prier mon Père et qu’il ne m’enverrait pas aussitôt plus de douze légions d’Anges ? Comment donc s’accompliront les Écritures, car il faut que cela arrive ? » En même temps, Jésus dit à cette troupe : « Vous êtes venu à moi comme à un voleur, avec des épées et des bâtons, pour me saisir ; j’étais tous les jours au milieu de vous, enseignant dans le temple, et vous ne m’avez pas arrêté. Or, tout cela s’est fait afin que les paroles des prophètes fussent accomplies. » Alors tous les disciples l’abandonnèrent et ils s’enfuirent. Mais ceux qui s’étaient saisi de Jésus l’emmenèrent chez Caïphe, grand-prêtre, où les scribes et les anciens s’étaient réunis. Or, Pierre le suivit de loin jusque dans la cour de la maison du grand-prêtre et, y étant entrés, il s’assit avec les domestiques pour voir la fin. Cependant les princes des prêtres et tout le conseil cherchaient un faux témoignage contre Jésus pour le faire mourir et ils n’en trouvèrent point, quoique plusieurs faux témoins se fussent présentés. Enfin, deux faux témoins vinrent déposer : « Il a dit : Je puis détruire le temple de Dieu et le rebâtir après trois jours. » Et le grand-prêtre se leva et lui dit : « Vous ne répondez rien à ce qu’ils déposent contre vous ? » Mais Jésus se taisait. Et le grand-prêtre lui dit : « Je vous adjure, par le Dieu vivant, de nous dire si vous êtes le Christ, le Fils de Dieu ? » Jésus lui répondit : « f Vous l’avez dit ; au reste, je vous le déclare, vous verrez un jour le Fils de l’homme assis à la droite du Dieu tout-puissant et venant sur les nuées du ciel. » Alors le grand-prêtre déchira ses vêtements, disant : « Il a blasphémé, qu’avons-nous encore besoin de témoins ? Vous venez d’entendre le blasphème ; que vous en semble ? » Ils répondirent : « Il mérite la mort. » Aussitôt, on lui cracha au visage, on le frappa à coups de poing et d’autres lui donnèrent des soufflets, disant : a Christ, prophétise-nous, qui est-ce qui t’a frappé ? » Pierre cependant était dehors assis dans la cour et une servante, s’approchant, lui dit : « Vous aussi, vous étiez avec Jésus de Galilée. » Mais il le nia devant tous, disant : « Je ne sais ce que vous voulez dire. » Et comme il sortait, une autre servante, l’ayant vu, dit à ceux qui étaient là : « Celui-ci accompagnait également Jésus de Nazareth. » Et il le nia une seconde fois avec serment, disant : « Je ne connais point cet homme. » Et peu après, ceux qui étaient là, s’approchant, dirent à Pierre : « Vous êtes certainement de ces gens-là, car votre langage vous trahit. » Alors il se mit à faire des imprécations et à jurer qu’il ne connaissait point cet homme, et aussitôt le coq chanta. Et Pierre se ressouvint de la parole que Jésus lui avait dite : i Avant que le coq chante, vous me renierez trois fois. » Et, étant sorti, il pleura amèrement. Le lendemain matin, tous les princes des prêtres et les anciens du peuple tinrent conseil contre Jésus pour le faire mourir. Et, l’ayant lié, ils l’emmenèrent et le livrèrent au gouverneur Ponce Pilate. Alors Judas, le traître, voyant qu’il était condamné, se repentit et reporta les trente pièces d’argent aux princes des prêtres et aux anciens, leur disant : « J’ai péché en livrant le sang innocent. » Mais ils lui dirent : « Que nous importe ? c’est votre affaire. » Et ayant jeté cet argent dans le temple, il se retira et alla se pendre. Mais les princes des prêtres, ayant pris l’argent, dirent : « Il n’est pas permis de le mettre dans le trésor, parce que c’est le prix du sang. » Et ayant délibéré là-dessus, ils en achetèrent le champ d’un potier pour y ensevelir les étrangers. C’est pourquoi ce champ est appelé encore aujourd’hui Hacéldama, c’est-à-dire, le champ du sang. Alors cette parole du prophète Jéré-mie fut accomplie : « Ils ont reçu trente pièces d’argent, suivant l’appréciation des enfants d’Israël, et ils les ont données pour le champ d’un potier, comme le Seigneur me l’a ordonné. » Or, Jésus comparut devant le gouverneur, qui l’interrogea en ces termes : « Êtes-vous le Roi des Juifs ? » Jésus lui répondit ; t « Vous le dites. » Et comme les princes des prêtres et les anciens l’accusaient, il ne répondit rien. Alors Pilate lui dit : « N’entendez-vous pas tout ce dont ils vous accusent ? » Et il ne lui répondit pas un seul mot, de sorte que le gouverneur en était fort étonné. Or, le gouverneur avait coutume, à la solennité de Pâque, de délivrer un prisonnier, celui que le peuple voulait. Il y en avait alors un fameux, nommé Barabbas. Comme ils étaient donc réunis, Pilate leur dit : « Lequel voulez-vous que je vous délivre. Barabbas ou Jésus, qui est appelé le Christ ? » Car il savait qu’ils l’avaient livré par envie. Pendant qu’il était assis à son tribunal, sa femme lui envoya dire : a Ne vous impliquez point dans l’affaire de ce juste, car j’ai été aujourd’hui étrangement tourmentée en songe à cause de lui. » Mais les princes des prêtres et les anciens persuadèrent au peuple de demander Barabbas et de faire périr Jésus. Le gouverneur leur dit donc : « Lequel des deux voulez-vous que je vous délivre ? » Ils lui répondirent : « Barabbas. » Pilate leur dit : « Que ferai-je donc de Jésus, qu’on appelle le Christ ? » Ils dirent tous : « Qu’il soit crucifié I » Le gouverneur dit : « Quel mal a-t-il donc fait ? » Mais ils se mirent à crier encore plus fort : « Qu’il soit crucifié I » Alors Pilate, voyant qu’il ne gagnait rien, mais que le tumulte croissait de plus en plus, prit de l’eau et, se lavant les mains devant le peuple, il dit : « Je suis innocent du sang de ce juste ; vous en répondrez. » Et tout le peuple répondit : « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants ! » Alors il leur délivra Barabbas, et ayant fait fouetter Jésus, il le leur livra pour être crucifié. Alors les soldats du gouverneur, ayant mené Jésus dans le prétoire, assemblèrent autour de lui toute la cohorte et, l’ayant dépouillé, ils le revêtirent d’un manteau d’écarlate. Et tressant une couronne d’épines, ils la lui mirent sur la tête, et un roseau dans la main droite, et s’agenouillant devant lui, ils se moquaient de lui, disant : « Salut, Roi des Juifs. » Et, lui crachant au visage, ils prenaient le roseau et lui en frappaient la tête. Après s’être ainsi joués de lui, ils lui ôtèrent le manteau, lui remirent ses habits et l’emmenèrent pour le crucifier. Comme ils sortaient, ils rencontrèrent un homme de Cyrène, nommé Simon, qu’ils contraignirent à porter la croix de Jésus. Et étant arrivés au lieu appelé le Golgotha, c’est-à-dire le lieu du Crâne (Calvaire), ils lui donnèrent à boire du vin mêlé de fiel ; et Jésus, l’ayant goûté, n’en voulut point boire. Après qu’ils l’eurent crucifié, ils se partagèrent ses vêtements, les tirant au sort, afin que s’accomplît ce qu’avait dit le prophète : « Ils se sont partagé mes vêtements et ils ont tiré ma robe au sort. » Et, s’étant assis, ils le gardaient. Ils mirent au-dessus de sa tête une inscription indiquant la cause de sa condamnation : C’est Jésus, le Roi des Juifs. En même temps, on crucifia avec lui deux voleurs, l’un à sa droite et l’autre à sa gauche. Et les passants l’accablaient d’injures, branlant la tête et lui disant : « Eh bien, toi qui détruis le temple de Dieu et le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même ; si tu es le Fils de Dieu, descends de la croix. » Les princes des prêtres se moquaient aussi de lui, avec les scribes et les anciens, disant : « Il a sauvé les autres et il ne peut se sauver lui-même. S’il est le Roi d’Israël, qu’il descende maintenant de la croix et nous croirons en lui. Il met sa confiance en Dieu ; si Dieu l’aime, qu’il le délivre : car il a dit qu’il était le Fils de Dieu. » Les voleurs qui étaient crucifiés avec lui, lui disaient les mêmes injures. Or, depuis la sixième heure jusqu’à la neuvième, toute la terre fut couverte de ténèbres, et vers la neuvième heure, Jésus poussa un grand cri, disant : « Eli, Eli, lamma sabachthâni ? » c’est-à-dire : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? » Quelques-uns de ceux qui étaient là, ayant entendu cela, disaient : « Il appelle Élie. » Et aussitôt, l’un d’eux courut prendre une éponge qu’il remplit de vinaigre, et, l’ayant mise au bout d’un roseau, il lui présenta à boire. Les autres disaient : « Attendez, voyons si Élie viendra le délivrer. » Mais Jésus, poussant encore un grand cri, rendit l’esprit. (Ici on se met à genoux, l’espace d’un Pater.) Et voilà que le voile du temple fut déchiré en deux, du haut jusqu’en bas ; la terre trembla, les pierres se fendirent, les sépulcres s’ouvrirent et plusieurs corps de Saints, qui étaient morts, ressuscitèrent et sortant de leurs tombeaux après sa résurrection, ils vinrent dans la ville sainte et apparurent à plusieurs. Or, le centurion et ceux qui étaient avec lui pour garder Jésus, ayant vu le tremblement de terre et tout ce qui se passait, furent saisis d’une grande crainte et dirent : « Cet homme était vraiment le Fils de Dieu. » Il y avait là aussi, un peu plus loin, plusieurs femmes qui avaient suivi Jésus depuis la Galilée pour le servir, parmi lesquelles étaient Marie-Madeleine, Marie, mère de Jacques et de Joseph, et la mère des fils de Zébédée. Sur le soir, un homme riche d’Arimathie, nommé Joseph, qui était lui aussi disciple de Jésus, alla trouver Pilate et lui demanda le corps de Jésus. Pilate commanda qu’on le lui donnât. Joseph ayant pris le corps, l’enveloppa dans un linceul blanc et le mit dans un sépulcre neuf qu’il avait fait tailler dans le roc : et ayant roulé une grande pierre à l’entrée du sépulcre, il s’en alla.

Suite du Saint Evangile selon saint Mathieu (Mt. 27, 45-52.) :
Après qu’on eut crucifié Jésus, depuis la sixième heure jusqu’à la neuvième, toute la terre fut couverte de ténèbres, et vers la neuvième heure, Jésus poussa un grand cri, disant : « Eli, Eli, lamma sabachthâni ? » c’est-à-dire : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’avez-vous abandonné ? » Quelques-uns de ceux qui étaient là, ayant entendu cela, disaient : « Il appelle Élie. » Et aussitôt, l’un d’eux courut prendre une éponge qu’il remplit de vinaigre, et, l’ayant mise au bout d’un roseau, il lui présenta à boire. Les autres disaient : « Attendez, voyons si Élie viendra le délivrer. » Mais Jésus, poussant encore un grand cri, rendit l’esprit. (Ici on se met à genoux, l’espace d’un Pater.) Et voilà que le voile du temple fut déchiré en deux, du haut jusqu’en bas ; la terre trembla, les pierres se fendirent, les sépulcres s’ouvrirent et plusieurs corps de Saints, qui étaient morts, ressuscitèrent.

L’Offertoire est une nouvelle prophétie de David. Elle annonce l’abandon où le Messie se verra réduit au milieu de ses angoisses, et la férocité de ses ennemis qui dans sa faim lui présenteront le fiel, et dans sa soif l’abreuveront de vinaigre. Ainsi a été traité celui qui s’apprête à nous donner son corps pour nourriture et son sang pour breuvage.

Offertoire (Ps. 68, 21-22.) :
Mon coeur est dans l’attente des humiliations et des souffrances. Je cherche quelqu’un qui s’attriste avec moi, mais en vain ; un consolateur, et je n’en trouve pas. Pour nourriture, ils me donnent du fiel ; et dans ma soif, ils m’abreuvent de vinaigre.

La Secrète demande à Dieu pour ses serviteurs le double fruit de la Passion du Christ : la grâce dans le temps et la gloire pour l’éternité.

Secrète :
Faites, Seigneur, nous vous en prions, que ce sacrifice que nous offrons à votre divine Majesté nous obtienne la grâce de la dévotion et nous acquière la récompense du bonheur éternel.

Dans l’Antienne de la Communion, l’Église, qui vient d’aspirer la vie du Christ dans le calice du salut, rappelle cet autre calice que le Christ a dû boire pour nous mériter le breuvage de l’immortalité.

Communion(Matth. 26, 42.) :
Père, si ce calice de souffrances ne peut passer sans que je le boive, que votre volonté soit faite.

La sainte Église conclut les demandes du Sacrifice qu’elle vient d’offrir, en implorant la rémission des péchés pour tous ses enfants, et l’accomplissement du désir qu’ils ont d’avoir part à la résurrection glorieuse de l’Homme-Dieu.

Postcommunion :
Seigneur, que, par l’action de ce divin sacrement, nous soyons délivrés de nos vices et que nos désirs légitimes soient comblés.

Achevons cette journée du Rédempteur à Jérusalem, en repassant dans notre mémoire les autres faits qui la signalèrent. Saint Luc nous apprend que ce fut pendant sa marche triomphale vers celle ville que Jésus, près d’y entrer, pleura sur elle, et exprima sa douleur par ces lugubres paroles : « Oh ! Si tu connaissais, aujourd’hui surtout, ce qui pourrait te donner la paix ! Mais tout cela est maintenant caché à tes yeux. Il viendra des jours où tes ennemis t’environneront, te renverseront par terre, et ne laisseront pas en toi pierre sur pierre, parce que tu n’as pas connu le temps de ta visite [10]. »

Il y a peu de jours, le saint Évangile nous montrait Jésus pleurant sur le tombeau de Lazare ; aujourd’hui nous le voyons répandre de nouvelles larmes sur Jérusalem. A Béthanie, il pleurait en songeant à la mort du corps, suite et châtiment du péché ; mais cette mort n’est pas sans remède. Jésus est « la résurrection et la vie ; et celui qui croit en lui ne demeurera pas dans la mort toujours [11] ». Mais l’état de l’infidèle Jérusalem figure la mort de l’âme, et cette mort est sans résurrection, si l’âme ne revient pas à temps vers l’auteur de la vie. Voilà pourquoi les larmes que Jésus répand aujourd’hui sont si amères. Au milieu des acclamations qui accueillent son entrée dans la cité de David, son cœur est triste ; car il sait que beaucoup « ne connaîtront pas le temps de leur visite ». Consolons le cœur de notre Rédempteur, et soyons-lui une Jérusalem fidèle.

Le divin récit nous apprend que Jésus, aussitôt après son entrée dans la ville, se rendit au Temple, et qu’il en chassa les vendeurs [12]. C’était la seconde fois qu’il accomplissait cet acte d’autorité dans la maison de son Père, et nul n’osa lui résister. Les princes des prêtres et les Pharisiens murmurèrent, ils se plaignirent à lui du tumulte qu’avait causé son entrée ; mais leur audace était déconcertée. C’est ainsi que, dans la suite des siècles, quand il plaît à Dieu de glorifier, à certaines époques, son Fils et l’Église de son Fils, les ennemis de l’un et de l’autre protestent dans la rage de leur cœur ; le char triomphal n’en poursuit pas moins sa marche. Mais sitôt que Dieu, dans sa haute sagesse, a résolu de faire succéder des jours de persécution et d’épreuves à ces heures de gloire, ces lâches ennemis se retrouvent, et, plus irrités que jamais, ils ne se donnent point de repos qu’ils n’aient entraîné une partie de ce peuple, qui criait Hosannah au fils de David, à demander qu’on le lui livre et qu’il soit crucifie. Mais Jésus et son Église n’en ont pas moins régné ; et si leur règne visible semble interrompu, c’est pour reparaître plus tard, jusqu’à ce que, après une succession de gloire et d’ignominies, la royauté de l’Époux et de l’Épouse soit proclamée éternelle sur les ruines du monde « qui n’aura pas connu le temps de sa visite ».

Nous apprenons de saint Matthieu [13] que le Sauveur alla terminer cette journée à Béthanie. Sa présence dut suspendre les maternelles inquiétudes de Marie et rassurer la pieuse famille de Lazare. Mais dans Jérusalem nul ne se présenta pour offrir l’hospitalité à Jésus ; du moins l’Évangile ne fait aucune mention à ce sujet. Les âmes pieuses qui ont médité la vie de notre Seigneur ont appuyé sur cette considération : Jésus honoré le matin d’un triomphe solennel, et réduit, le soir, à aller chercher la nourriture et le repos hors de la ville qui l’avait accueilli avec tant d’acclamations. Dans les monastères de Carmélites de la réforme de sainte Thérèse, il existe un usage touchant qui a pour but d’offrir au Sauveur une réparation pour l’abandon dont il fut l’objet de la part des habitants de Jérusalem. On dresse une table au milieu du réfectoire, et on y sert un repas, après le dîner de la communauté, ce repas offert au Sauveur du monde est distribué aux pauvres qui sont ses membres. Nous terminerons cette journée en insérant ici quelques strophes d’une Hymne de la Liturgie Grecque, en ce Dimanche des Palmes. Elle a pour auteur le célèbre hymnographe Côme de Jérusalem.

In Dominica Palmarum.

Le Dieu qui est assis sur les Chérubins, au plus haut des cieux, et qui abaisse ses regards sur ce qu’il y a de plus humble, vient aujourd’hui dans la gloire et la puissance ; tout est rempli de sa divine grandeur. Paix sur Israël, et salut pour les gentils !

Les âmes des justes s’écrièrent dans l’allégresse : Une nouvelle alliance se prépare aujourd’hui pour le monde ; les peuples vont être renouvelés par l’aspersion du sang divin.

Le peuple et les disciples fléchissent les genoux avec joie, et portant des palmes chantent : Hosannah au fils de David : vous êtes digne de toute louange, Seigneur, Dieu de nos pères ; vous êtes béni.

La multitude au cœur simple, l’enfance naïve vous ont célébré comme il convient à un Dieu, vous, roi d’Israël et souverain des Anges : Vous êtes digne de toute louange, Seigneur, Dieu de nos pères ; vous êtes béni.

Ton roi s’est présenté, ô Sion ! Le Christ monte sur le petit de l’ânesse. Il vient délier le joug de l’erreur grossière qui poussait l’homme à adorer les idoles ; il vient arrêter le cours des passions aveugles qui règnent sur toutes les nations ; tous chanteront maintenant : Œuvres du Seigneur, bénissez-le, et exaltez son nom dans tous les siècles.

Livre-toi à la joie, ô Sion ! Le Christ ton Dieu règne à jamais. Il est doux, et il vient pour sauver, comme il est écrit de lui ; il est le juste, notre rédempteur qui s’avance monté sur le petit de l’ânesse. Il brisera l’audace de ceux qui ne veulent pas chanter en ce jour ; Œuvres du Seigneur, bénissez-le, et exaltez son nom dans tous les siècles.

L’inique et obstiné Sanhédrin, qui usurpait le Temple sacré, est chassé aujourd’hui ; il avait fait de la maison de prière, de la maison de Dieu, une caverne de voleurs, et refusait son amour au Rédempteur à qui nous chantons : Œuvres du Seigneur, bénissez-le, et exaltez son nom dans tous les siècles.

Le Seigneur Dieu parait devant nous ; faites-lui fête solennelle ; accourez pleins de joie ; chantons le Christ, et portant des palmes, crions à sa louange : Béni celui qui vient au nom de Dieu, notre Sauveur !

Peuple, pourquoi as-tu frémi contre les Écritures ? Prêtres, pourquoi méditez-vous de vains projets ? Pourquoi dites-vous : Quel est celui devant qui les enfants portant des palmes s’écrient : Béni celui qui vient au nom de Dieu, notre Sauveur ?

Hommes sans frein, pourquoi semez-vous le scandale sur la voie ? Vos pieds sont rapides pour répandre le sang du Seigneur ; mais il ressuscitera pour sauver tous ceux qui crieront : Béni celui qui vient au nom de Dieu notre Sauveur !